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La volonté d’agir, penser au processus et non au résultat

« Enfin, le sage regarde, en toutes choses, non le résultat mais la décision qu’il a prise. Les commencements dépendent de nous. L’issue, elle, est aux mains de la Fortune à qui je dénie le droit de me juger.» Sénèque, Lettres à Lucilius, lettre XIV.

Les stoïciens insistaient sur le fait qu’il faut faire la différence entre ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas. En faisant cette différence, nous pouvons arrêter de nous préoccuper sur ce qui n’est pas en notre contrôle pour chercher à agir sur ce qui l’est. C’est là où nous pouvons avoir un impact.

Mais lorsque nous agissons, lorsque nous faisons des efforts pour gagner un avantage, lorsque nous voulons apporter quelque chose de bénéfique au monde, nous risquons aussi de nourrir de faux espoirs, d’avoir des attentes trop grandioses, de penser qu’il suffit d’agir pour avoir ce pour quoi nous avons agis. Or ce n’est pas le cas. Car là aussi il faut faire la différence entre ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas.

Ce qui dépend de nous sont notre volonté d’agir, notre jugement sur ce que nous voulons faire, nos intentions. Lorsque nous faisons des efforts, nous maîtrisons notre discipline, le processus à travers lequel nous voulons atteindre notre objectif, la réalisation des étapes pour y arriver. Mais ce que nous ne maîtrisons pas, c’est le résultat. Nous ne sommes jamais certains que nos efforts seront récompensés lorsque la récompense vient de l’extérieur ou subit d’autres effets qui ne dépendent pas de nous.

Premier exemple, vous faites partie d’une équipe scientifique qui a passé plusieurs mois à travailler sur un robot capable d’aller sur des terrains dangereux afin de récupérer des informations géologiques ou atmosphériques. Vous avez beaucoup travailler sur ce projet, vous êtes compétent et vous avez pensé à tout ce qui pouvait mal se passer et vous avez essayer de prévenir contre ces problèmes éventuels. Vous avez testé votre robot autant que vous le pouviez. Vous avez fourni des efforts considérables pour que ce projet soit absolument parfait. Vous avez fait tout ce qui était en votre pouvoir pour réussir, et maintenant il faut lancer le robot dans le terrain dangereux. À partir d’ici, ce qui peut arriver n’est plus en votre pouvoir. Vous découvrirez peut-être quelque chose sur le terrain que vous ne saviez pas et qui risque d’influer sur le robot de manière négative. Peut-être qu’il y aura un imprévu météorologique qui diminuera de la précision des informations que vous vouliez récolter. Plusieurs choses peuvent mal se passer, mais cela ne dépend plus de vous. Tout ce qui dépendez de vous était de travailler au mieux que vous pouviez pour permettre la réussite du projet. La réussite en elle-même dépend de beaucoup d’autres choses. Il faut donc s’attendre aux résultats avec calme et équanimité.

Deuxième exemple, vous êtes un sportif qui joue en compétition, disons au football, et vous devez affronter une équipe adverse qui a l’air d’être redoutable. Le jour du match, juste avant le début, vous êtes anxieux, vous sentez vos jambes, dont vous êtes d’habitude fier, moins résistantes que les jours d’entraînement, et vous vous dites que vous risquez de perdre. Or le match n’a pas encore commencé. Ce qui dépend de vous c’est votre entraînement, vos efforts préalables au match, votre préparation, votre condition physique et mentale. Est-ce que vous vous êtes bien entraîné, bien mangé, bien dormi, bien récupéré ? C’est vous qui devez être certain d’avoir donné le maximum de ce que vous pouviez. Le jour du match, ce qui dépend de vous est de jouer à votre poste au mieux que vous pouvez, avec la plus grande volonté. Mais la victoire du match ne dépend pas de vous seul. Il y a vos équipiers qui doivent aussi donner le meilleur d’eux-mêmes. Il y a l’arbitre qui doit être très attentif à ce qui se passe dans le terrain. Et il y a l’équipe adverse qui peut être aussi redoutable qu’elle en a la réputation. Les efforts que vous avez fourni ne garantissent pas votre victoire, mais vous garantissent de donner le meilleur de ce que vous pouviez. Pour les prochains matchs, il ne faut pas penser à obtenir le résultat, il faut penser à comment arriver à l’atteindre, et continuer à fournir les efforts.

Troisième exemple, vous êtes un écrivain qui pense avoir quelque chose à raconter, que ce soit un roman ou un essai, et vous voulez être publié. Ce qui dépend de vous est surtout d’écrire, et d’essayer de vous améliorer dans votre écriture. Ce qui dépend de vous est de finir votre livre, et d’essayer de rendre votre histoire la plus intéressante possible au public que vous visez. Une fois que vous y êtes arrivés avec plus ou moins de satisfaction, vous pouvez envoyer votre livre aux éditeurs, mais il ne dépend pas de vous qu’ils l’acceptent. Ils peuvent le trouver moins bon que ce vous avez jugé, ils peuvent dire qu’il ne correspond pas à leur ligne éditoriale, il peuvent l’égarer, ils peuvent ne pas répondre. Cela dépend d’eux, mais plus de vous. Vous avez écrit le livre, et en tant qu’écrivain, il faut continuer à écrire. Et même si vous êtes édités, la réaction du public ne dépend pas de vous non plus. Peut-être que le marché est déjà saturé de livres similaires au vôtre, peut-être que le livre est sorti en même temps qu’un autre livre à scandale qui a aspirer toutes les ventes de livres pour l’année, peut-être que le public n’a pas été aussi attiré par votre proposition et que votre livre n’a pas fait écho, peut-être que les critiques trouvent systématiquement que votre type d’histoires est par défaut mauvais. Beaucoup de choses peuvent arriver qui ne dépendent pas de vous, et il ne faut pas vous décourager mais continuer à faire ce que vous savez faire de mieux : écrire.

Dernier exemple, votre travail consiste à assister des enfants en difficulté scolaire et à les aider à s’en sortir et à avoir de meilleures notes à l’école pour qu’ils puissent avoir un meilleur métier que s’ils restaient dans leur situation actuelle. Donc vous étudiez avec l’enfant, vous l’encouragez, vous faites gaffe à ce qu’il révise comme il faut, vous essayez de lui procurer le meilleur environnement possible pour qu’il puisse être aussi bon que possible. Mais sa réussite ne dépend pas de vous. C’est lui qui devra comprendre ses cours, c’est lui qui passera ses examens, et c’est lui qui devra assurer un métier plus tard. Vous pouvez fournir autant d’efforts que vous voulez, ce n’est pas vous qui êtes dans sa situation. Votre intention est bonne, votre travail est louable, mais le résultat n’est pas complètement de votre ressort, vous ne pouvez pas culpabiliser si l’enfant n’y arrive pas.

Donc même dans ce sur quoi nous pouvons agir, il y a des choses qui dépendent de nous et d’autres qui n’en dépendent pas. Le processus dépend de nous, les efforts, la volonté, le travail, et c’est ce sur quoi il faut se focaliser. Les résultats sont autant nos enfants que ceux de la Fortune. Ils ne dépendent pas que de nous, et c’est faire preuve de sagesse que de savoir maîtriser notre réponse face à eux et de nous focaliser sur nos efforts.

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