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La citadelle intérieure pour s’engager dans le monde

Sur la Citadelle intérieure, Thomas Bénatouïl, spécialiste de la philosophie antique, écrit : « il ne s’agit pas d’une retraite, mais de l’établissement d’une base arrière fortifiée, qui permet aussi bien de soutenir un siège que de mener une guerre d’escarmouches ou une offensive de grande ampleur » Les stoïciens III, I.1.

La Citadelle intérieure est une image qu’on connaît bien dans le stoïcisme. Il s’agit de construire à l’intérieur de soi un territoire imprenable où on peut se retirer lorsque les événements extérieurs risquent de nous déstabiliser. Et ça correspond à l’image du stoïcien imperturbable, que l’on peut attaquer, mépriser, ridiculiser, et qui ne montre aucun signe d’être affecté par ce qu’on a essayé de lui faire subir. C’est une image de force, mais défensive. On ne peut pas l’atteindre parce qu’il a construit sa citadelle intérieure où il a seul accès et où il peut se replier si nécessaire.

Bénatouïl est surprenant quand il dit que la citadelle intérieure peut servir pour mener une offensive. Et ça fait réfléchir sur la manière stoïcienne d’affronter le monde. C’est vrai que l’idée du stoïcien qui est tout le temps sur la défensive est un peu déprimante. Qui voudrait mener une vie où il est toujours à l’affût, craintif qu’il y ait quelque chose d’ingérable devant lui, à se demander s’il n’y a pas un drame qui l’attend au coin de la rue et qu’il faudrait qu’il soit prêt ? Cette manière de voir le monde protège contre les dangers. Mais elle est épuisante, et présuppose que le monde entier nous veut du mal. Où est la joie de vivre ?

En revanche, voir la citadelle intérieure comme un moyen de s’engager dans le monde pour mener des « offensives » est beaucoup plus positif et encourageant. Car on ne parle pas d’aller attaquer les gens, ni physiquement ni moralement. On imaginerait plutôt la citadelle comme une base à partir de laquelle on peut aller s’exposer devant les incertitudes de la vie, sans se sentir en danger. C’est un bouclier qui ne fait pas que protéger des flèches, mais qui permet aussi d’avancer sans craindre qu’une flèche ne fasse de dégâts. Alors on peut tenter beaucoup plus de choses !

Il faudrait voir la citadelle intérieure comme non seulement un moyen de défense mais un moyen d’avancer et d’agir avec la confiance que les coups, s’il y en a, ne feront pas aussi mal que nous le croyons. Donc il est inutile d’être craintif et éviter le danger qui n’est pas encore là. Il vaut mieux s’attaquer à ce qu’on a besoin de faire tout de suite, s’engager dans la vie comme on le souhaite, et en cas d’imprévu, on a la citadelle intérieure pour parer les coups.

Pour finir, et c’est une idée que j’ai déjà proposé ici auparavant : peut-être faut-il parfois ouvrir les portes de la citadelle, pour laisser certaines personnes chères entrer, et comprendre.

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