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Ce blog a trois ans: ce que j’ai appris du stoïcisme

Voici trois ans que je tiens mon blog sur la vie philosophique et le stoïcisme, et au moins le double que je pratique les exercices stoïciens. Qu’est-ce que j’ai appris finalement ?

Je ne suis pas arrivé au stoïcisme par la porte de la curiosité, j’y suis arrivé par la porte de la nécessité. La dépression, le nihilisme, la perte de sens, voilà les problèmes que la philosophie devait m’aider à surmonter. En lisant « Qu’est-ce que la philosophie antique? » de Pierre Hadot, j’ai découvert qu’il y a 2500 ans, plusieurs écoles philosophiques de l’antiquité avaient pour but d’abord d’enseigner: comment vivre. La philosophie n’était pas qu’un discours pour elles, c’était une manière de vivre. J’ai été fasciné de savoir que des gens aussi éloignés de moi par le temps affrontaient les mêmes questionnements que moi. Et j’ai été persuadé par le livre de Pierre Hadot qu’il était possible de non seulement s’en sortir des difficultés, mais aussi d’apprendre à vivre.

Je me suis alors mis sur le chemin de la philosophie. J’ai été surtout séduit par une des écoles présentées par Pierre Hadot, l’école du portique qui enseignait le stoïcisme. Il y a quelque chose en moi qui a créé cette affinité immédiate, peut-être un sens développé du tragique, un rapport très proche avec le sentiment de mortalité, une dureté et beaucoup d’exigence par rapport à soi. J’ai découvert avec Pierre Hadot que les philosophes ne faisaient par qu’écrire et parler, ils s’exerçaient pour arriver à leurs buts philosophiques. Alors j’ai commencé à travailler sur moi-même, en pratiquant les exercices dont parlait Pierre Hadot, mais je ne savais pas forcément comment les pratiquer. Après beaucoup d’essais, j’ai compris comment je pouvais pratiquer certains exercices et ce qu’ils pouvaient m’apporter. Les exercices d’attention à soi, d’examen du soir et de méditation du matin ont été essentiels. Savoir distinguer ce qui dépend de nous et ce qui n’en dépend pas et savoir se concentrer sur les premiers et accepter les seconds est un exercice qui permet d’avancer sur ce qui est important. Se rendre compte que nos réactions ne sont pas dues aux événements mais à nos jugements et à nos croyances qui interprètent ces événements nous ouvre les yeux sur les énormes filtres internes qui colorent pour nous la réalité.

Avec le stoïcisme, j’ai appris à mieux réagir à ce qui se passait dans ma vie, je suis moins anxieux et parfois même enthousiaste par rapport aux événements que je peux traverser. Car j’ai appris que j’étais capable de les traverser avec courage. Ils peuvent être durs, mais le stoïcisme m’a appris que ma manière d’agir dépendait de moi et que la peur et les autres émotions ne pouvaient pas me contrôler. J’ai appris à mieux maîtriser ces émotions qui autrefois minait ma journée. La tristesse avec laquelle je me réveillais s’est transformée en une détermination d’affronter la journée. Je me rends plus vite compte lorsque la colère commence à me prendre, et je me maîtrise mieux face à quelqu’un qui n’a pas appris comme moi à maîtriser sa colère, ce qui évite bien des conflits inutiles et stupides.

Le stoïcisme m’a appris que les désirs n’étaient pas tous bons, que souvent ils étaient la cause de notre malheur. Nous voulons les mauvaises choses, ce qui ne dépend pas de nous, et tant que nous le voulons, nous sommes tristes ou anxieux, ce qui n’a aucune influence sur la satisfaction de notre désir de toute façon. J’ai appris à être plus mesuré dans mes désirs, et à être heureux de ce que j’avais déjà. Car comment être heureux quand on obtiendra quelque chose que l’on veut si on ne sait pas être heureux ce qu’on a? Nos désirs sont souvent mal placés et excessifs. On se targue d’être passionné et de vouloir vivre sa vie jusqu’au bout, alors qu’on ne fait que souffrir de ses désirs sans jamais apprendre de ses souffrances, puis à avoir une vision cynique de la vie après s’être fait démolir par ses propres défauts dont on était si fier. Le stoïcisme nous apprend à ne pas se laisser démolir, mais à construire ce qui résiste aux tentatives de destruction.

Le stoïcisme nous apprend à mieux réagir aux événements de la vie, mais le stoïcisme n’est pas qu’un ensemble d’exercices pratiques pour se sentir mieux. C’est ce qui le différencie d’une thérapie comme les Thérapies Comportementales Cognitives qui sont fabuleuses pour se sortir de problèmes psychologiques. Le stoïcisme est une philosophie. Il montre aussi une manière de vivre et de voir le monde. Il ne s’agit pas de guérir d’une maladie, mais de diriger toute sa vie. Les stoïciens portaient le courage, la justice, le contrôle de soi et la sagesse au plus haut point. C’est ce qu’ils demandent à suivre. Car on peut faire ce que l’on veut de sa vie, ne pas avoir de point fixe et partir vers le premier désir qui nous attire. Mais on ne peut pas vivre tout le temps sans repères, sans boussole, à naviguer sans direction. Un jour on chavire et on se noie. Le stoïcisme répond à la question « qu’est-ce qu’une bonne vie? » Sa réponse peut ne pas correspondre à tout le monde, néanmoins les philosophes de l’époque n’étaient pas frileux de dire ce qui était pour eux une bonne vie et de s’y tenir.

Je ne vais pas idéaliser le stoïcisme, les années de pratique et la confrontation avec la vie réelle m’ont montré des limites du stoïcisme sur lesquels je pourrais m’étendre. C’est facile de faire glisser beaucoup de choses dans notre vie dans la case des choses qui ne dépendent pas de nous, par paresse, par peur ou par orgueil, et de ne pas agir sur elles pour les changer. Notre réserve et notre manque de réaction face aux événements peuvent passer pour de la froideur et du désintérêt pour les autres et pour ce qui se passe, ce que les gens autour de nous vont retenir. Les problèmes que nous avons nécessitent parfois des solutions concrètes et non pas une attitude face à eux et un changement de vision. La vie n’est pas une succession de tragédies qui ont besoin d’être affrontées les dents serrées, il y a de la joie de vivre qui parfois manque dans le stoïcisme.

Mais le stoïcisme reste une philosophie formidable pour apprendre à mieux vivre, à mieux évaluer sa situation, à mieux réagir aux événements, à mieux contrôler ses émotions et ne pas être contrôlé par elles, à mieux gérer ses désirs, à mieux traverser les difficultés, à être plus conscient de sa vie et ne pas la laisser couler inconsciemment. Le stoïcisme m’a apporté tellement que j’ai envie de partager ses leçons avec les autres. J’espère pouvoir continuer ce blog encore un moment, et apporter à ceux qui en ont besoin le secours du stoïcisme. Je vous remercie pour votre lecture, et vous souhaite le meilleur.

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