La philosophie n’est pas sans dangers, sans pièges.
Le stoïcisme est une philosophie de la résilience. Elle apprend à savoir endurer, se battre, dépasser l’adversité, et devenir plus indépendant des événements extérieurs. Sauf qu’on peut chercher l’indépendance pour de mauvaises raisons.
Comme quand un animal est blessé et cherche à se cacher dans sa tanière, on peut trouver dans le stoïcisme un abri pour ne plus sentir ce qui nous fait souffrir. L’image stoïcienne de la citadelle intérieure est exactement ça : un endroit pour se retirer quand les événements extérieurs nous arrivent de plein fouet.
Le stoïcisme ne devrait pas être une excuse pour éviter d’affronter émotionnellement le monde. On peut se dire qu’on veut être plus fort et indépendant au travers du stoïcisme, et se convaincre que c’est la bonne voie pour ne plus souffrir de ce qui nous a blessé. Or ce n’est pas gagner de l’indépendance que de se cacher derrière une citadelle.
On peut être bien stoïque, fier, avec le sentiment d’être puissant, imbattable, la poitrine haute, parce qu’on pense que rien ne peut nous toucher. Mais rien ne nous touche parce qu’on est désengagé émotionnellement. On a tout mis derrière la citadelle et on a fermé à clé. Les autres ne peuvent plus nous atteindre. On est stoïque, libre, indépendant, mais seul.
C’est un des risques quand on s’intéresse au stoïcisme. De croire avoir trouvé le moyen d’affronter le monde, et de finir par s’en échapper. Ce n’est pas le but du stoïcisme, et l’on devrait faire plus attention à quelles raisons nous poussent à aller sur cette voie. Le stoïcisme apporte beaucoup de résilience, mais celle-ci n’est vraiment bénéfique que si elle permet d’être encore plus engagé dans le monde.