Si nous devions faire une hiérarchie des relations que nous avons dans notre vie en prenant la plus longue et celle qui a le plus d’effet sur nous, celle qui viendrait dans le plus haut du classement, bien au-dessus de tout le reste, c’est la relation que nous avons avec nous-même.
Nous sommes tout le temps dans notre tête, tout le temps à imaginer l’avenir et à essayer de faire des choix, tout le temps à se rappeler du passé et à essayer de donner du sens à ce qui s’est passé. C’est une relation à laquelle il est impossible d’échapper, même avec tous les efforts du monde, nous aurons toujours à écouter et à parler à cette voix qui est notre tête.
Beaucoup de gens ont une si mauvaise relation avec eux-mêmes qu’ils passent leur vie malheureux, misérables jusqu’au dernier degré, alors qu’ils ont tout pour ne pas l’être. De l’extérieur, une personne vous paraît en très bonne santé, avec une excellente situation économique, mais intérieurement elle est dans un conflit permanent. Personne ne peut vivre sainement en étant dans un conflit permanent.
Pour les stoïciens, la maîtrise de la relation avec soi est un des premiers et plus importants devoirs que nous devons faire pour vivre une bonne vie. Le discours intérieur permet d’apporter un jugement sur les événements extérieurs et leur donner du sens. Et c’est ce sens qui nous affecte, pas l’événement en lui-même.
Ce n’est pas l’avenir qui nous affecte, c’est comment nous l’imaginons. Ce n’est pas le passé qui nous fait du mal, c’est comment nous l’interprétons. Deux personnes dans la même situation vont se projeter différemment dans l’avenir, et l’un aura un discours intérieur qu’il maîtrisera alors que l’autre laissera sa tête inventer tout le malheur qu’elle est capable d’imaginer. Et elle est capable d’imaginer le pire qui n’arrivera peut-être jamais. Ou comme disait Sénèque : « Il y a Lucilius, plus de choses qui nous font peur que de choses qui nous font mal ; c’est plus souvent l’imagination que la réalité qui nous met en peine. » Lettres à Lucilius, 13.
La maîtrise du discours intérieur est une compétence qui s’apprend. Comme un lutteur qui apprend à devenir meilleur à la lutte, il est possible d’apprendre à avoir un meilleur discours intérieur. L’exercice stoïcien de l’attention à soi permet de se rendre compte de toutes les paroles qui traversent l’esprit, et de n’approuver que celles qui émettent un bon jugement sur le monde. C’est en répétant l’exercice que le discours intérieur devient plus maîtrisé.
La conversation que nous avons dans notre tête peut déterminer la qualité de notre vie, alors si l’on veut améliorer la qualité de sa vie, il faut apprendre à avoir une meilleure conversation avec soi.