À quel besoin le stoïcisme répond, et pourquoi est-ce qu’on y trouve refuge ?
Cela n’étonne personne si je dis que la vie est dure, et j’ajoute que la solitude est plus commune qu’on ne le croit. On peut être entourés de gens, être extraverti, ne pas avoir de temps pour soi, et pourtant se sentir seul et sans vrai point d’attache. Alors on doute de ses amis. Ils sont là mais pour combien de temps ? Eux aussi ils ont une vie, d’autres envies et d’autres projets. Un jour ils s’en iront, l’un après l’autre. On a cette impression.
Il nous manque quelque chose de plus stable, de plus pérenne, de plus certain et sûr, un endroit où l’on pourrait revenir quand tout va mal. Un secours, des bras à prendre, des yeux tendres, de l’affection qui va au-delà de la camaraderie. On a besoin d’être vu pour qui on est quand tout va mal, et de ne pas être rejeté. C’est une grande peur que l’on a en cachette : de n’être aimé que lorsqu’on est fort, et de devoir se justifier quand on ne l’est pas.
Si on pouvait trouver un refuge certain, qui nous accueille dès que l’on est en péril, alors la philosophie n’aurait pas d’intérêt. Le stoïcisme serait une religion de masochistes. Nous n’en aurions pas besoin. Mais cet endroit ne se trouve nulle part. Et le sentiment de solitude dans le monde et de fragilité de notre existence n’a pas de solution ultime. Le stoïcisme répond à cette inquiétude en nous sommant de nous renforcer contre les aléas de la vie. Peut-être que l’on trouvera quelques autres refuges entre-temps, mais il n’y en a aucun de plus certain que celui que l’on peut construire à l’intérieur de soi. La citadelle intérieure se construit comme abri et tour de guet. Elle est là pour se protéger et surveiller. Pour ne pas flancher quand les choses vont mal. Ce refuge n’est pas aussi doux que celui que l’on aurait préféré. Il n’est pas aussi chaleureux. Mais il est celui que l’on a tout de suite à disposition, tant que nous y prenons soin et travaillons à le renforcer.